Céline Angibaud
Sophie Daviet
Marjolaine Louveau
Un désir de plus en plus fort de plonger au plus profond de l'organisme pour découvrir le point de fusion entre deux mondes réels l'organique et l'organisé, de chercher à les unifier pour pouvoir ensuite savourer des corps dissous hors de leur frontière charnelle.
En parallèle de ce travail chorégraphique, une vidéo, construite comme des déambulatoires dans la profonde intimité de la chair, permet de plonger dans l'infiniment petit, de parcourir le grouillement des cellules, de plonger de l'autre côté de notre frontière charnelle créant ainsi un deuxième « espace temps ».
Voyage au cour de l'homme
C'est sur l'infiniment petit que le rideau s'ouvre, plongeant le spectateur dans un bain de cellules en mouvement : celle de sa chair et de son sang. Cellules rondes ou fusiformes, en croissance ou en division, qui vont et viennent, se frôlent, fusionnent ou se séparent, envahissant l'espace scénique en entier, englobant murs et plafond. Elles ont pour nom neurones, fibroblastes, phagocytes, cellules dendritiques ou pavimenteuses, et proviennent du cerveau, des muscles, du cour, de la peau, offrant un étrange ballet en se croisant, en se chevauchant, en se divisant. Filmées ainsi au ralenti ou, au contraire, en accéléré, elles proposent des images fort étranges peu communes de la vie qui coule en nous, de ce qui nous constitue, de ce qui donne naissance à nos mouvements, à notre pensée.
Au cour de ce tourbillon de vie, une femme, curieusement, émerge comme une sirène de l'océan, belle et mystérieuse avec ce voile de tulle en corolle enserrant de longues et fines jambes, dégageant son torse nu de déesse: le mouvement qui, peu à peu, l'anime se fond dans celui des cellules qui l'entourent, s'y amalgament pour mieux en sortir l'instant d'après. Roulement d'une lame de fond dans les humeurs de notre corps, ou tourbillon tumultueux du flot sanguin au carrefour des vaisseaux nourriciers, enchevêtrés dans des tissus avides de conquérir l'espace? Déferlent alors devant nos yeux mille images plus étonnantes les unes que les autres, tantôt calmes et ondulantes, tantôt survoltées : celle d'un microorganisme explorant le corps dans ces moindres méandres, à l'image d'un navigateur sur un radeau descendant un torrent aux flots déchaînés et capricieux ou, à l'inverse, une rivière calme et bien paisible.
Nathalie Pubellier- car c'est d'elle qu'il s'agit- sera bientôt remplacée par trois êtres tout aussi étranges, tout aussi lilliputiens qu'elle et qui, poursuivant cette exploration, vont peu à peu s'infiltrer dans ce microcosme, se faufilant au cour des différents tissus, dont le mouvement, parfois, n'est pas sans évoquer un torrent de lave en fusion. Images baignées par les douces ambiances de Thierry d'Oliveira et soutenues fort à propos par la partition musicale aux profondeurs abyssales de Jean-Marie Machado.
Le plus étonnant dans cette ouvre, d'une portée onirique extraordinaire, est le fait que la chorégraphe ait élaboré un ballet en communion parfaite avec les séquences cinématographiques glanées auprès des physiologistes du CNRS (INSERM) et exploitées en toute connaissance de cause, non sans en avoir parfaitement évalué le sens : à ce titre, remarquable est la séquence finale dans laquelle un biologiste pouvait aisément décrypter la phagocytose de nos trois exploratrices par une cellule chargée de la défense de l'organisme, leur lente et inexorable digestion par ses enzymes dans un calme apaisant puis leur rejet à l'extérieur, une fois privée de vie. Quand la science rejoint l'art.
Jean-Marie Gourreau
In : Danse Danse Danse, n°35- janvier février mars 2003, pp25-26.
Revue de l'INSERM
La science influence l'art et réciproquement (.) Ce spectacle en est la merveilleuse illustration. Mais ici, quelque chose en plus : 3 arts du temps, cinéma, danse et musique se mêlent, s'entrecroisent, s'épaulent, s'interpénètrent.. Danse et biologie via respectivement la chorégraphie et la cinémicrographie nous offre des pulsations de vies microscopiques et macroscopiques qui nous happent au creux du plexus solaire pour remonter à cet organe vital qui lui aussi rythme notre moi biologique, notre cour. Art et sciences se marient très bien et le spectacle de Nathalie Pubellier en est le témoin vivant. L'émotion de tout ce qui touche à l'art, vision métaphorique de notre environnement, rejoint cette autre émotion qui touche à la science, vision de notre environnement qui se veut objective mais qui passant par l'homme devient également métaphorique.
Marcel Pouchelet, Laboratoire de Cinémicro, Le Vesinet (78)
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